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Renaud est passé pro dans la logistique à vélo

La mobilité est au centre de la vie professionnelle et personnelle de Renaud Sarrazin. Jugez plutôt : né à Cognac, il grandit ensuite près de Marseille. Puis un beau jour – enfin, un jour d’hiver, froid, marqué par une couche de neige incroyable - il débarque en Belgique. On est en 1998. Il a alors 12 ans mais il s’en souvient très bien !

Plus de 20 ans après, il est toujours là. Comme dit son fils de 5 ans : « tu es Français de sang, Belge de cœur ».

Après des études d’ingénieur civil, option construction, il trouve un travail à Wavre et intègre alors la communauté des navetteurs : « je pestais matin et soir dans les bouchons mais en transports ça m’aurait mis quatre fois plus de temps ».

Puis, il est engagé dans un centre de recherche sur la sécurité routière à Bruxelles. « J’ai alors abandonné ma voiture et suis passé au vélo. Mes trajets sont devenus un plaisir », raconte-t-il.

Au centre de recherche, il étudie la possibilité de rendre plus durables les infrastructures routières lors de leur construction. Il rédige également une thèse. Un jour, lors d’un séminaire, il rencontre Philippe Lovens. « Ca a été une révélation ! J’ai été frappé par son énergie », se rappelle-t-il.

C’est avec lui et Céline Lefebvre qu’ils vont lancer le projet Urbike en mai 2018. « Toutes les villes sont confrontées à des problèmes concernant la livraison des marchandises », note-t-il. En effet, les accès aux villes se réduisent, il y a des embouteillages… Ce que le trio propose c’est la livraison des marchandises – sur ces fameux derniers kilomètres - avec des vélos équipés de remorques permettant de transporter des petits conteneurs.

Charger et décharger en une minute

La particularité d’Urbike est que la remorque est adaptée aux dimensions des palettes européennes. Il n’est donc pas nécessaire de transférer le contenu des clients vers le conteneur. Celui-ci est chargé et déchargé directement du vélo vers l’entrepôt en trois clics. « En une minute, tu prends ta palette et tu repars. Le vélo est donc le moyen le plus rapide pour effectuer ce dernier kilomètre », affirme Renaud Sarrazin.

Et les conteneurs peuvent transporter jusqu’à 180 kilos. « Cela répond très largement à la demande des clients. On est souvent en-dessous de 100 kilos », souligne Renaud.

Le système a été pensé et modifié plusieurs fois pour s’adapter au mieux à chaque client. Le conteneur peut ainsi être structuré avec des étagères par exemple. « Nous avons aussi des vélos hyper puissants », précise le co-fondateur d’Urbike.

En fonction des clients, Urbike fournit vélos et conteneurs ou propose « simplement » des formations et des conseils en matière de logistique : comment organiser les tournées pour éviter les montées quand on est chargés au maximum par exemple ? L’équipe d’Urbike a rencontré diffférents clients pour leur présenter le projet : Bpost, Delhaize, Multipharma et CSD. « On espérait avoir un ou deux clients parmi ceux-ci mais nous avons obtenu les quatre », sourit Renaud.

Une vraie nécessité pour les entreprises

« Notre projet répond donc à un besoin réel. Il y a une vraie nécessité pour les entreprises, ce n’est pas juste un coup marketing », observe-t-il. « Selon une étude européenne, une livraison sur quatre à Bruxelles pourrait être faite à vélo. Actuellement, on en est à une sur mille alors que nous pourrions en faire une sur trois ou deux à vélo. En effet, les difficultés d’accès aux centres urbains augmentent alors que les technologies et les équipements des vélos s’améliorent très vite ».

L’équipe se donne deux ans prouver que le vélo est effectivement la solution la plus rapide. A Schaerbeek, 3 facteurs ont été formés et ont demandé à continuer après la phase pilote. Du côté de Delhaize, le magasin Fresh des Galeries Ravenstein est uniquement livré à vélo. Et Urbike travaille pour augmenter l’offre à cinq autres magasins en ville.

Très sensible à la question des conditions de travail des coursiers et les conditions de travail en général, Renaud met un point d’honneur à proposer des solutions à ce niveau via un partenariat avec l’Université Saint-Louis à Bruxelles. « Nous travaillons avec deux chercheurs spécialisés en droit du travail. Certains coursiers aiment la flexibilité mais cela ne doit pas rimer avec précarité. En fait, quelqu’un de flexible devrait être mieux payé que les autres », estime-t-il.

« Je ne perds jamais une minute ! »

Il a aussi la volonté de transformer la ville rapidement pour en faire un lieu plus agréable pour tous. Lui et sa compagne n’ont plus de voiture. Ils font tout à vélo : ils habitent près du Parvis de Saint-Gilles, Renaud travaille près de Porte de Hal et leur fils va à l’école dans le quartier.

« Mon fils est le premier activiste : il ne comprend pas que ses copains n’aillent pas à l’école à vélo. « C’est plus rapide, c’est plus gai », dit-il. Il ne comprend pas la place accordée à la voiture. Moi, je collectionne un peu les vélos. Ce que nous n’avons pas, c’est un vélo cargo car nous n’avons pas la place pour le stocker. »

Pour les plus longs trajets, le couple a un abonnement Cambio. « J’aime aussi beaucoup combiner le train avec Cambio ou le train avec un Blue-bike de la SNCB », explique-t-il. « Rouler à vélo m’a rendu très performant dans la gestion de mon agenda. Je ne perds jamais une minute ! ».

Un article de Violaine Jadoul

Photos par Gilles Bolland